La statue de la Liberté – Naissance d’un symbole – Strasbourg
Heureux 130ème Anniversaire à notre Statue de la Liberté, la création visionnaire d’Auguste Bartholdi, symbole universel de la Démocratie dont le MDFDE fêtera le 130ème Anniversaire de son inauguration l’année prochaine via notre ambitieux projet MDFDE/Paris-NYC16. A suivre…
Elisabeth Jenssen
https://www.francaisdeletranger.org/blog/mdfdefrance-usa-lancement-du-projet-mdfdeparis-nyc-16/
17 juin 1885 : la Statue de la Liberté débarque à New York
Par Marie-Aude Bonniel Mis à jour Publié
La statue «la liberté éclairant le monde», son nom d’origine, est un cadeau offert par les Français. Son inauguration sur l’île de Beldoe se déroule en octobre 1886. Crédits photo : Rue des Archives/©MEPL/Rue des ArchivesLES ARCHIVES DU FIGARO – Il y a 130 ans, la Statue de la Liberté, l’oeuvre colossale d’Auguste Bartholdi construite à Paris, arrive en pièces détachées à New York. Elle est accueillie par une foule en liesse.
Revenons sur la genèse de ce projet, sur la construction de cette sculpture monumentale et enfin sur son acheminement en bateau et son inauguration à New York. L’idée voit le jour en 1865. Edouard Laboulaye, parlementaire de centre gauche et fervent partisan de la démocratie américaine souhaite célébrer le centenaire de l’indépendance des États-Unis et sceller l’amitié franco-américaine.
À l’époque, certains intellectuels français proches des républicains modérés rêvent d’un nouveau régime avec plus de libertés individuelles. Le sculpteur Auguste Bartholdi est un ami d’Edouard Laboulaye avec qui il partage sa conception de la démocratie. Cette connivence entre les deux hommes les rapproche dans le projet d’offrir un monument aux États-Unis. La défaite contre la Prusse en 1870, renforce l’idéal républicain de Bartholdi et c’est ainsi que le projet prend forme. Suite à un voyage aux États-Unis en 1871, Bartholdi découvre l’île de Beldoe dans la rade de New York. C’est là qu’il imagine dresser «La liberté éclairant le monde». La réalisation débute en 1875 pour s’achever neuf ans plus tard en 1884. Dès 1874, l’Union-Franco-Américaine est fondée pour collecter des fonds. Plusieurs moyens sont utilisés: les articles dans la presse, des loteries, des banquets, les appels aux dons des particuliers…
Présentation de la tête de la Statue de la Liberté lors de l’Exposition universelle de 1878 à Paris.Bartholdi a un sens de la communication novateur: ainsi, il organise des campagnes de photographies pour promouvoir son projet. Il présente la tête et le buste de la statue de la liberté à l’exposition universelle de Paris en 1878. On peut la visiter: l’argent recueilli sert pour les travaux. Un diorama- mise en scène en usage surtout au XIXème siècle- donne l’illusion aux spectateurs d’être en mouvement devant la statue en rade de New York. Pour une modique somme, on peut assister à ce spectacle. La main a, elle, été présentée à l’exposition de Philadelphie en 1876. Dans les ateliers Gaget Gauthier et Cie, cuivrerie et plomberie d’art, au 25 rue de Chazelles dans le XVIIème arrondissement, les Parisiens peuvent également la découvrir dans la cour. Elle surplombe majestueusement les toits de Paris au-dessus de la plaine Monceau. La moyenne des visites sur une année est de 1.700 visites pour les dimanches et pour les jours «ordinaires» de 500. (Le Figaro du 10 janvier 1885).
La Statue de la Liberté surgissant des toits de Paris, rue de Chazelles vue par Victor Dargaud (1884). Crédits photo : Rue des Archives/Rue des Archives/TallandierÀ l’origine la conception de la statue est confiée à Viollet-le-Duc; il réalise les structures de la main et du flambeau. Mais après sa mort en 1879, Bartholdi fait appel à l’ingénieur Gustave Eiffel qui commence à avoir une certaine notoriété avec la construction de ponts ferroviaires et des viaducs. Eiffel imagine une armature en métallique comme une sorte de colonne vertébrale sur laquelle les plaques de cuivre sont rivetées. Cette armature est concue pour pourvoir s’adapter au climat de la rade de New York. Elle est assez souple pour bouger au gré du vent. Trois cents feuilles de cuivre, martelées et formées sont attachées à l’armature.
Le 24 octobre 1881, à l’initiative du comité franco-américain, M. Morton ministre des États-Unis à Paris, est invité dans les ateliers Gaget et Gauthier, pour poser le premier rivet devant servir à réunir la statue à son socle. Répondant à Edouard Laboulaye, président de l’Union franco-américaine, M. Morton fait un discours «des plus sympathiques à la France», il s’est ensuite «avancé sur l’estrade et a donné plusieurs coups de marteau sur un rivet posé d’avance dans le pied gauche de la statue.» (Le Figaro du 25 octobre 1881)
Si le financement est organisé par les Français, le coût de l’assemblage est astronomique. Les États-Unis doivent financer l’immense socle de la statue. Le financement du piédestal prend du retard car les Américains n’arrivent pas à rassembler les fonds nécessaires. Certains ont laissé entendre que le gouvernement américain ne voulait pas payer. Mais, en réalité, ce projet franco-américain est une œuvre privée, donc le Congrès américain ne doit pas verser d’argent. En revanche, comme le souligne Le Figaro du 7 avril 1885, le Congrès a depuis longtemps accepté la statue par la loi datant du 22 février 1877: elle prévoit «les frais de l’inauguration et de l’entretien du monument à destination bien spécifiée de phare électrique».
Une de The World du 11 août 1885 annonçant 100.000 dollars de dons réunis pour continuer les travaux de la Statue de la Liberté. Crédits photo : Rue des Archives/© Granger NYC/Rue des ArchivesFace à la frilosité des Américains, au printemps 1885, le magnat de la presse Joseph Pulitzer (1847-1911) lance dans son quotidien The World une large campagne de souscription. Il en appelle à la fierté nationale. C’est un succès et les travaux vont pouvoir être achevés.
La statue terminée, il faut l’envoyer à New York. Le démontage de la statue commence fin 1884. Cette opération délicate doit prendre au moins trois mois. Les diverses pièces du colosse sont numérotées et soigneusement rangées dans plus de deux cents caisses. «Une équipe de douze ouvriers, sous la direction de M. Bouquet, est affectée spécialement au démontage, au repérage, au numérotage de la statue. Ces douze ouvriers seront également chargés de la reconstruction du colosse de cuivre, à l’entrée de la rade de New-York, lorsque le travail du piédestal sera achevé.» (Le Figaro 10 janvier 1885).
De Paris à Rouen, la statue est transportée par chemin de fer. Ensuite elle entreprend la traversée de l’Atlantique à bord de l’Isère (transport d’État offert et ce sont les seules dépenses du voyage supportées par le gouvernement Français). À bord de la frégate, se trouvent les Bartholdi et les époux Gaget. Lors de l’arrivée de l’Isère à New York en juin 1885*, la frégate est saluée par des salves d’artillerie et des vivats de la foule immense.
Le remontage peut être fait assez rapidement, mais l’attente de la finition du socle entraîne un délai important entre l’arrivée de la statue en juin 1885 et son inauguration officielle le 28 octobre 1886.
Lors de l’inauguration, Auguste Bartholdi est entouré d’une délégation française. Les cérémonies sont très festives: des fanfares, des feux d’artifice et des défiles militaires et civils. Le président Grover Cleveland (1837-1908) prononce un discours axé sur la notion de liberté plus que sur l’idée de la commémoration d’indépendance. Le symbole de la liberté prend le dessus.
Depuis son installation, la statue de la liberté est un symbole universel: elle incarne la liberté représentée par les chaînes brisées de l’esclavage gisant à ses pieds et l’émancipation face à l’oppression.
En 1927, le monument est classé monument national par les États-Unis et depuis 1984, elle fait partie du patrimoine de l’UNESCO. Elle est un des monuments le plus fréquenté au monde: 4 à 5 millions de visiteurs s’y pressent chaque année.
* Suivant les sources, la date d’arrivée dans le port de New York varie entre le 17 et le 19 juin 1885.
Sources: La statue de la Liberté, le défi de Bartholdi, Paris, Gallimard, 2004
Marie-Sophie Corcy, Lionel Dufaux, Nathalie Vu Huong
Les carnets du musée des arts et métiers: La Statue de la Liberté, Conservatoire National des Arts et Métiers, les objets.
Édouard Laboulaye et la Statue de la Liberté, l’élaboration de l’expérience démocratique. Stephen W. Sawyer, traduit de l’anglais par Marc Kirsch. La lettre n° 26 © Collège de France
En 1885, le Figaro a une rubrique «Figaro en Amérique»; après un séjour à Terre-Neuve, son «correspondant» revient tout juste à New York en ce début juillet 1885. Il retrouve les rues de New York en proie à une ambiance festive et joyeuse depuis l’arrivée de la statue de Bartholdi.
Article paru dans Le Figaro du 8 juillet 1885.
Et voyez le hasard – c’est par ce cri familier et… sympathique de Vive la République! et par les refrains de la Marseillaise que nous sommes salués à notre descente du train à New-York. Ne croyez pas un seul instant que cette ovation s’adressât au représentant du Figaro… oh! non.
La ville entière retentit depuis quelques jours, de ces cris joyeux: toutes les rues sont pavoisées, partout flotte le drapeau tricolore français, et pour cinq sous chaque New-Yorkais peut enrichir son album des portraits de Victor Hugo, Gambetta, Jules Grévy, de Lesseps et – Bartholdi.
Ce dernier est le héros du jour. Les habitants ne savent plus comment témoigner de leur joie depuis qu’ils ont vu, et compté, à bord du bâtiment français l’Isère, les trois cents caisses qui contiennent les trois cents morceaux de la fameuse statue de la Liberté éclairant le Monde. «Cette fois-ci, nous l’avons!» s’écrient-ils avec un air de satisfaction mêlé d’orgueil, qui vous a toute l’apparence de vouloir dire que «si Paris avait le colosse – ce serait un petit New-York!» A la vérité, ils ont raison d’être fiers du don superbe que leur a fait le peuple français et leur reconnaissance est bien naturelle. Lorsque la statue apparaîtra sur l’île Bedloe, et que sa torche électrique flamboiera sur toute la rade de New-York, l’effet sera magique.
Mais pour la voir ainsi, il faudra patienter un peu, et c’est ce qui me chiffonne. Car enfin, on aurait bien pu le réaliser depuis longtemps, ce million de francs destiné à la construction d’un piédestal digne de l’œuvre. Les Américains se sont laissé tellement tirer l’oreille – passez-moi l’expression – pour souscrire au malheureux piedestal-fund que celui-ci ne sera terminé que dans deux ou trois ans. C’est à la gloire d’un journal de New-York, le World, d’avoir ces derniers temps, secoué l’apathie du public; notre confrère vient en effet, de verser entre les mains du comité du piédestal, près de 100.000 dollars – total d’une souscription ouverte dans ses colonnes, il y a deux mois à peine.
Les officiers de l’Isère et du vaisseau- amiral la Flore, à bord duquel se trouve l’amiral Lacombe, ne conserveront pas moins un excellent souvenir de l’accueil qu’ils reçoivent en ce moment de la part des Américains. Depuis leur arrivée à New-York, ce n’a été pour eux qu’une suite de banquets, de parades, de présentations, d’adresses, etc., et les réjouissances continuent. Le télégraphe, sans doute, vous tient au courant des bonnes journées que passent maintenant les Français en Amérique. Vous a-t-il aussi informé du départ subit de notre consul-général à New-York, au moment même où l’Isère pénétrait dans la rade? M. Lefaivre est parti, en vertu d’un congé qu’on dit définitif, pour la France, et c’est l’excellent consul de France à Chicago, M. Edmond Bruwaert, qui a été appelé à le remplacer.
Il faudra près d’un mois, pour débarquer de l’Isère, les trois cents énormes caisses dans lesquelles sont emballés les morceaux de la gigantesque statue. Celle-ci restera démontée et remisée sur l’île Bedloe, jusqu’à la fin des travaux. En attendant l’état-major de l’ Isère et de la Flore vont se rendre bientôt à Washington afin de présenter leurs hommages au président de la République.
Par Salvador