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La goélette scientifique Tara quittera Lorient le 28/05 pr une expédition en Asie-Pacifique http://ow.ly/10ENRv
«Notre expédition rappelle les grandes expéditions conduites au XVIIIe siècle par La Pérouse ou James Cook. Mais nous emportons avec nous les outils scientifiques du XXI siècle, et en particulier ceux de la génomique».
Serge Planes, chercheur au Centre National français de la Recherche Scientifique (CNRS) et directeur de l’Expédition Tara PACIFIC (2016-2018).
Paris, 14 avril 2016
Lancement de Tara PACIFIC (2016-2018)
Une nouvelle expédition au coeur du corail
La goélette scientifique Tara quittera son port d’attache de Lorient le 28 mai 2016 pour une nouvelle expédition en Asie-Pacifique. Elle sillonnera l’océan Pacifique sur près de 100 000 km pendant plus de deux ans avec, à son bord, une équipe scientifique interdisciplinaire, coordonnée par le CNRS et le Centre Scientifique de Monaco (CSM). Leur objectif est d’ausculter de manière inédite la biodiversité des récifs coralliens et leur évolution face au changement climatique et aux pressions anthropiques. Cette aventure est soutenue par le CNRS, Paris Sciences et Lettres, le CEA, le CSM et de nombreux autres partenaires publics et privés.
Alors que les récifs coralliens couvrent moins de 0,2% de la superficie des océans, ils réunissent près de 30% de la biodiversité marine connue. Leur santé est donc cruciale pour la diversité des espèces qu’ils abritent mais aussi pour l’humanité. Alors qu’une grande partie des récifs tend à disparaître ces dernières années, étudier cet écosystème fragile et menacé devient une priorité.
D’est en ouest et du sud au nord, Tara parcourra l’océan Pacifique pour découvrir la diversité des récifs coralliens et mieux appréhender leurs capacités d’adaptation aux changements climatiques. Du canal de Panama à l’archipel du Japon (2016-2017), puis de la Nouvelle Zélande jusqu’en Chine (2017-2018), la goélette croisera 11 fuseaux horaires à travers l’océan le plus vaste de la planète, joignant notamment les terres insulaires et les récifs les plus isolés de la planète.
Une approche inédite de la biodiversité des récifs
Le caractère unique de cette expédition consiste tout d’abord en son approche « transversale » d’une zone géographique très étendue, en l’occurrence le Pacifique, où se concentre plus de 40 % des récifs coralliens de la planète. Une telle approche n’avait encore jamais été réalisée jusqu’à présent à cette échelle.
Selon Serge Planes, chercheur CNRS et directeur scientifique de l’expédition, « Tara Pacific tentera de dévoiler la biodiversité d’un récif, à la fois génomique, génétique, virale ou bactérienne, pour la comparer à celle de la masse d’eau qui l’entoure. Le but est de se faire une idée réelle de la diversité globale d’une colonie corallienne. » Elle permettra également d’apporter de nouvelles connaissances sur le rôle encore inconnu joué par les paramètres biologiques, chimiques ou physiques dans la vie des colonies coralliennes et la capacité de ces dernières à s’adapter aux changements environnementaux.
Un bâtiment sur un ponton dans le lagon de Tetamanu, atoll de Fakarava, archipel des Tuamotu, Polynésie française. © Thomas VIGNAUD/CNRS Photothèque
L’expédition Tara Pacific traversera un très large gradient de biodiversité qui atteindra son maximum au « Triangle de corail » en Asie du Sud-Est. Au cours de l’expédition, quarante archipels seront étudiés de façon identique pour appréhender les variations de la biodiversité à travers trois espèces récifales : deux coraux et un petit invertébré de la famille des hydraires.
Par une approche comparative et interdisciplinaire, les scientifiques tenteront de remonter dans le passé récent des colonies coralliennes, d’observer l’évolution contemporaine des récifs et d’en envisager le futur, notamment à travers des modélisations.
Outre l’état de santé du récif et sa biodiversité à différents niveaux, l’équipe scientifique s’intéressera aux capacités de résistance, d’adaptation et de résilience de ces écosystèmes. Un dernier axe d’étude portera sur les éventuelles applications de la biologie corallienne pour la recherche médicale.
Sensibiliser et partager les enjeux environnementaux
« Si la communauté scientifique a besoin de ces nouvelles données, les acteurs locaux et internationaux aussi. Tara contribuera à mieux comprendre les enjeux qui touchent ces berceaux de biodiversité que sont les récifs et qui importent tant pour l’avenir des populations notamment dans les petites îles » indique Etienne Bourgois, président de la Fondation Tara Expéditions.
La Fondation Tara Expéditions profitera de cette expédition pour interpeler les acteurs politiques et le monde économique, sensibiliser la société aux enjeux écologiques les plus urgents ainsi qu’aux problématiques rencontrées par les populations qui dépendent de la bonne santé de l’océan. De nombreuses escales dans le Pacifique et en Asie permettront de partager avec le plus grand nombre, petits et grands, ces enjeux environnementaux.
Étapes majeures – Panama, Malpelo (Colombie), Ile de Pâques, Papeete (Polynésie Française), Iles Cook, Samoa, Wallis et Futuna, Iles Marshall, Micronésie, Mariannes, Japon, Taïwan, Fidji, Nouvelle Zélande, Nouvelle Calédonie, Papouasie Nouvelle Guinée, Philippines, Chine, Hong Kong, Corée du Sud, …
Partenaires majeurs de l’expédition –
Sélection de photos disponibles sur les coraux: http://phototheque.cnrs.fr/p/300-1-1-0/ (sur demande auprès de phototheque@cnrs.fr).
Le haut des coraux, « Pocillopora spp. » émerge parfois lors des marées les plus basses. Atoll de Fakarava, archipel des Tuamotu, Polynésie française. © Thomas VIGNAUD/CNRS photothèqueTélécharger le dossier de presse
Contacts :
Contacts presse
CNRS : Priscilla Dacher
T +33 (0)1 44 96 46 06
priscilla.dacher@cnrs-dir.fr
Tara Expéditions : Elodie Bernollin
T+ 33 (0)6 95 73 26 88
elodie@taraexpeditions.org
http://www2.cnrs.fr/presse/communique/4507.htm
http://oceans.taraexpeditions.org/
Après 13 ans d’existence, Tara est désormais reconnue comme fondation d’utilité publique.
Créée en 2003, l’aventure Tara Expéditions est devenue un fond de dotation en 2009, statut qui a permis de réaliser les expéditions ainsi que les avancées scientifiques qui s’y rattachent. Les sept années d’exercice de Tara en tant que fonds de dotation ont permis de prouver sa capacité à ancrer ses projets dans le temps, s’appuyant sur la pertinence scientifique et des soutiens financiers fidèles sur le long terme.
Porté par nos partenaires qu’ils soient scientifiques, pédagogiques, financiers, ou médiatiques, Tara Expéditions devient aujourd’hui une fondation reconnue d’utilité publique, gage de sa pérennité et de sa crédibilité, sous l’impulsion de nos fondateurs agnès b. et Etienne Bourgois. Aujourd’hui de plus en plus reconnu et crédible à l’étranger, pour Etienne Bourgois, Président de la Fondation Tara Expéditions, « Tara Expéditions évolue et grandit. Lui donner ce nouveau statut de fondation rejoint notre volonté de renforcer l’organisation, en France et à l’international, de faire évoluer sa gouvernance et de pérenniser l’action. ».
« L’autre évolution majeure, importante pour la pérennité de Tara, c’est que l’on va pouvoir recevoir des fonds publics et faire appel plus globalement aux dons privés, et notamment aux legs. Avoir une reconnaissance de l’Etat c’est aussi important aujourd’hui étant donné notre implication à ses cotés dans bon nombre de processus multilatéraux » explique Romain Troublé, Directeur général.
Ce nouveau statut va également permettre de recevoir des fonds publics pour soutenir spécifiquement des projets de coopération scientifique internationale et ainsi renforcer les capacités de jeunes chercheurs. C’est le cas du projet pilote qui se lance en partenariat avec le Fonds Français pour l’Environnement. Il permettra à de jeunes doctorants issus de pays du Sud, de participer à l’exploitation des données sur le plancton récoltées pendant l’expédition Tara Oceans.
Si le changement de statut de Tara Expéditions n’atteint en rien l’identité même du projet, dont la mission reste la prise de conscience globale du rôle de l’océan dans la machine climatique et le développement durable, l’objectif est bel et bien de prolonger et d’amplifier l’action déjà entreprise depuis 13 ans pour sensibiliser encore plus, et encore mieux.
Parés à reprendre la mer !
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OCÉANS
Tara, une expédition au chevet des coraux
Denis Delbecq Publié jeudi 14 avril 2016 à 21:13.
Le voilier Tara va bientôt partir pour un périple de deux ans et demi à travers le Pacifique afin d’étudier les coraux, fragilisés par le réchauffement climatique
184 ans après le voyage du Beagle de Darwin, qui lui a permis d’étudier les récifs coralliens de manière approfondie, seize marins et scientifiques quitteront le port français de Lorient le 28 mai à bord du voilier Tara pour une nouvelle épopée scientifique. Un périple de deux ans et demi et 100 000 kilomètres à travers le Pacifique qui vise à mieux comprendre la fragilité des coraux.
Lire aussi: La Grande Barrière de corail en danger
Les récifs coralliens ne représentent que 0,2% de la surface des océans, mais ils abritent 30% de leur biodiversité. «Sur un seul kilomètre carré de récif, on trouve autant d’espèces vivantes que sur l’ensemble du littoral français», résume Serges Planes, du Centre National français de la Recherche Scientifique (CNRS).
Le directeur scientifique de l’expédition Tara Pacific était à Paris jeudi 14 avril à l’occasion d’une présentation à la presse. Le projet est piloté par la Fondation Tara Expéditions, avec le soutien de nombreux partenaires scientifiques, comme le CNRS et le Centre scientifique de Monaco, et de sponsors privés conduits par la styliste Agnès B, instigatrice, en 2003, des expéditions Tara.
La goélette Tara F.LATREILLE / TARA PACIFIC
Proches des côtes, les récifs sont des espaces fragiles soumis à nombreuses agressions. Certaines sont liées à la proximité des hommes, qui aménagent des ports et déversent toutes sortes de polluants. D’autres sont plus globales, comme le changement climatique qui acidifie les eaux océaniques et les réchauffe.
«On considère que 20% des récifs de la planète ont disparu, que 15% sont menacés à dix ans, et que 20% sont menacés à 40 ans», avertit Serge Planes. Autrement dit, au milieu de ce siècle, la moitié des récifs pourraient avoir disparu, avec des conséquences dramatiques pour les 500 millions d’humains qui en tirent leurs moyens de subsistance et une protection contre les assauts des océans.
Plongée et prélèvements
Une fois traversé le canal de Panama, Tara rejoindra début septembre l’île de Pâques, puis fera route vers l’ouest. «La traversée est-ouest nous permettra d’étudier une variété de récifs de Panama, où la diversité des coraux est faible, jusqu’aux Philippines et en Indonésie, où l’on dénombre de 600 à 700 espèces», indique Serge Planes. Puis un second axe du parcours, sud-nord, donnera un aperçu de la diversité des récifs de la Nouvelle-Zélande au Japon.
L’archipel nippon offre aussi une opportunité unique: sa localisation et sa géologie lui confèrent une grande diversité de température et d’acidité de l’eau, qui apportera des informations précieuses sur l’adaptation du corail à un climat réchauffé.
L’itinéraire de l’expédition Tara PacificLes six ou sept scientifiques, qui se relaieront à bord toutes les 6 semaines, plongeront, prélèveront des coraux, des algues, de l’eau et les microorganismes qu’ils contiennent (bactéries, virus, champignons, etc.). Ils creuseront délicatement le socle des récifs formé par l’entassement des squelettes de coraux, pour prélever des carottes de roche.
«Elles nous permettront d’étudier la croissance des récifs et l’évolution de leur environnement physico-chimique au cours des 50 à 100 dernières années», se réjouit Denis Allemand, du Centre scientifique de Monaco, le codirecteur scientifique de l’expédition. Des données précieuses pour comprendre l’impact du réchauffement climatique sur les coraux et la manière dont ils se sont, ou pas, adaptés.
Vie en symbiose
Pas moins de dix ans de travail seront nécessaires pour analyser les 30 à 40 000 échantillons que Tara doit prélever. «Notre expédition rappelle les grandes expéditions conduites au XVIIIe siècle par La Pérouse ou James Cook. Mais nous emportons avec nous les outils scientifiques du XXI siècle, et en particulier ceux de la génomique», justifie Serge Planes.
Les scientifiques espèrent une moisson de réponses aux questions que posent les coraux. «Ils vivent depuis 200 millions d’années en parfaite symbiose avec les espèces de leur environnement», résume Serge Planes. A un point tel que les zooxantelles, ces
microalgues qui les colorent, vivent au cœur même des cellules du corail!
C’est d’ailleurs un divorce d’avec les zooxantelles qui explique le blanchissement du corail: quand l’eau se réchauffe trop, l’animal expulse ces microalgues. Il devient transparent — laissant apparaître la blancheur du squelette — et s’expose aux brûlures du soleil. Si la température ne redescend pas au bout de quelques semaines, l’animal finit par mourir et le récif est condamné.
Blanchissement
Un blanchissement spectaculaire s’est produit en 1997 et 1998, sous l’effet d’un fort El Niño, ce phénomène naturel de réchauffement des eaux de surface du Pacifique équatorial. 18% des récifs de la planète avaient été tués en six mois. Un autre est probablement en cours puisqu’un El Niño est réapparu l’an dernier, plus fort que celui de 1997. «Nous serons au cœur de cet événement, ce qui nous permettra d’essayer de comprendre pourquoi certaines espèces, et pourquoi certains récifs éloignés des hommes, résistent mieux que d’autres au réchauffement», explique Serge Planes.
Reste à savoir combien de temps cette résistance pourra durer. Dans la revue «Science» du 14 avril un groupe de chercheurs confirme que depuis trente ans, les coraux de la Grande Barrière australienne ont acquis une certaine tolérance à la chaleur, qui a atténué leur blanchissement. Mais ils pronostiquent, hélas, qu’à l’avenir une nouvelle hausse de 0,5°C suffirait à dissiper cette protection.
Lire aussi: Péril acide sur les coraux
Lien : http://www.letemps.ch/sciences/2016/04/14/tara-une-expedition-chevet-coraux